III – « El Camino de Santiago » 

1 : de l’organisation à la marche, premier voyage

 

 

 

Tableau tiré d’une page Internet de pèlerin (Gérard du camino http://perso.wanadoo.fr\gerard-du-camino\index.html )

adressée aux apprentis pèlerins.

 

 

 

 

 

III – « El Camino de Santiago » 

1 : de l’organisation à la marche, premier voyage

 

 

« La marche vers Compostelle est l’une des plus grandes que l’on puisse accomplir. Non, pas à cause de sa durée propre mais par tout ce qui précède le départ, et tout ce qui suit le retour »

Léo Gantelet (pèlerin de Compostelle)

 

Pour comprendre ce qui pousse aujourd’hui un individu sur les chemins de Compostelle, et saisir pour quelles raisons l’expérience au long cours s’affiche comme une composante prédominante actuelle du pèlerinage, il faut se concentrer sur les différentes pratiques inhérentes à celui-ci. L’intérêt de cette démarche a pour but de concevoir le phénomène dans son champ d’application contemporain, ce qui permet d’une part, de mieux cerner les différentes pratiques remodelées du pèlerinage, leurs tenants et aboutissants ; afin d’introduire d’autre part, une analyse des problématiques pèlerines compostellanes, prévue dans le dernier chapitre.

Pour introduire ici l’analyse des trajectoires pèlerines contemporaines, il faut concevoir le pèlerinage dans une optique processuelle, qui englobe les différentes séquences de celui-ci. Comme le dit Léo Gantelet, le pèlerinage ne se limite pas à un simple jeu d’aller-retour entre son point de départ et la ville de Compostelle. Celui-ci s’inscrit dans une succession d’étapes, de sa préparation, voire de sa « cogitation », à son achèvement et sa continuité… C’est pour cette raison que l’objet de mes recherches, se concentrera principalement dans les trois prochains chapitres sur la trajectoire de pèlerins, avant (chapitre III), pendant (chapitre IV) et après (chapitre V) le pèlerinage.

Cependant, il faut garder à l’esprit que la problématique pèlerine se construit autour de l’expérience pèlerine, constituée pas à pas, chemin faisant, sans laquelle il n’y aurait aboutissement de ce projet. Car comme tout projet de grande envergure, le pèlerinage confronte son acteur à certaines remises en cause de ses habitudes quotidiennes. Le fait de concevoir cette expérience sous forme de trajectoire, permet de mieux distinguer cette constellation de traits, de caractères, qui font basculer l’individu d’un mode de vie ordinaire à un mode extraordinaireA ce sujet, Dominique Julia écrit dans un ouvrage collectif consacré à la marche que l e pèlerinage est en effet rupture du quotidien, arrachement au grain des jours ordinaires, sortie de soi pour aller vers un ailleurs, la marche étant ici tendue vers son terme […] La marche pèlerine [pour le cas de Compostelle représenté par l’expérience au long cours] est un temps de passage qui s’inscrit d’emblée dans l’extraordinaire, temps d’un pur présent qui s’écrit entre le moment du départ et celui de l’aboutissement où l’on touche le but tant désiré. C’est pourquoi gestes et rites qui encadrent ce temps sont si chargés de sens (Rauch, A., 1997, page 31). Si j’appuie les dires de l’auteur sur le fait que l’expérience de pèlerinage au long cours amène l’individu à traverser successivement une dimension ordinaire, puis extraordinaire du phénomène, je tiendrais à préciser que le fait de considérer celui-ci sous le seul angle de la marche pèlerine, le restreint à une vision quelque peu essentialiste. Car s’il est vrai que le temps de marche se calque sur un « temps de pur présent », celui-ci s’intègre et prend son sens dans un jeu d’opposition entre les interactions des séquences ordinaire et extraordinaire. Il est donc important de concevoir ce temps de marche comme inscrit dans la trajectoire du pèlerin, pour comprendre les tenants et aboutissants de cette partie de l’expérience pèlerine, face aux autres étapes constitutives de celle-ci. .

Aussi, une dissection de l’expérience pèlerine en plusieurs séquences, permet de ne pas tomber dans une catégorisation du phénomène au simple fait religieux : celui-ci – qui, quand bien même reste-t-il un des composants majeurs du pèlerinage - limite le phénomène à la seule dimension sacrale patente, n’incluant que fort peu les métamorphoses auxquelles se confrontent, au cours du temps, l’individu et/ou sa problématique pèlerine. Si le pèlerin vit un temps fort entre le début et l’aboutissement physique du pèlerinage, nous verrons comment la pérégrination influe directement sur le quotidien de celui-ci, en amont, mais aussi en aval du pèlerinage.

Ce que je souhaite donc faire ressortir, c’est que la préparation et l’aboutissement de la marche pèlerine, ne sont pas en définitive un début et une fin en soi, mais plutôt les articulations d’un processus beaucoup plus large, beaucoup plus long, caractérisé par la problématique pèlerine et l’expérience complète du pèlerinage au long cours.

Pour l’instant, il sera question dans ce chapitre de présenter la première séquence du pèlerinage : comment devient-on pèlerin, comment s’y prépare-t-on et surtout comment s’opère la transition entre un mode de vie ordinaire et un mode de vie extraordinaire. Je laisse aux soins des chapitres IV et V l’ethnographie des séquences suivantes, c’est-à-dire le temps de pèlerinage et de post pèlerinage.

 


Extrait de la Gazette de Poitiers (02 Avril 2001) sur le site : http://anenet.free.fr/le_pelerin/ le_pelerin.htm

 

« Mercredi 3 Juin 1998, je commence le premier des voyages vers Saint Jacques, celui que l’on fait avant. Ce journal ne sera certainement pas quotidien dans cette partie du voyage, mais il devrait m’accompagner, me précéder, me suivre […] suivre l’évolution du projetCitation tirée d’un journal de pèlerin. Elle fait référence à une autre citation dont l’auteur du journal se souvient avoir entendu avant son départ : « Un voyage n’est accompli que lorsqu’on l’a effectué trois fois : un fois avant le départ, un fois en chemin, et un fois au retour… ». Le terme « voyage » peut être assimilé à ce que j’appelle « séquence de pèlerinage ». ». Cette citation du journal de bord de Jean, pose ici les termes d’une première volonté à effectuer le voyage. Jean, partira sur les routes quatre ans plus tard, en 2002. Quatre ans pour faire mûrir son projet à souhait, pour l’organiser. Mais bien souvent, la séquence précédant le pèlerinage est beaucoup plus longue que cela n’y paraît. Car celle-ci commence généralement à germer dans les esprits bien des années auparavant.

 

1 – Appel de la route : comment devient-on apprenti pèlerin

 

Ce que je définis par « appel » est ce qui pousse le pèlerin sur les chemins de Compostelle. Il se caractérise au fur et à mesure par la détermination de l’individu qui, étape après étape, entraîne l’accomplissement de son projet. Cette première étape renvoie à certains « ressentis » inhérents à l’individu, qui prennent une grande place dans la vision qu’il se fait de sa vie. Généralement, ce ou ces « ressentis » apparaissent dans un temps de transition, qui marque la fin d’une activité, d’un état émotionnel, d’un sentiment, d’une période dans la vie, ou encore un choix personnel qui ne trouve pas de solutions dans l’environnement proche… Chacun se construit ses propres raisons de partir. Si l’on peut facilement deviner que chaque « ressenti » est aussi différent l’un de l’autre que peut l’être un individu d’un autre, en revanche tous ont en commun la même solution : pérégriner vers Compostelle. Car chacun voit en cet acte, du moins pour son premier voyage, un certain recours ou ne serait-ce qu’un début pour se mettre sur la voie du changement. Le cas d’Enrique, pèlerin Espagnol originaire de Madrid vivant à Barcelone, illustre bien cette situation : il m’a expliqué lors d’un premier entretien, qu’il avait remis en cause son poste de manager du secteur commercial dans une multinationale, afin de mener son projet à terme. Ce dernier optait pour un changement radical dans son parcours professionnel, se rendant compte que son dernier emploi ne convenait plus à ses conceptions personnelles de la vie. Ici, la décision de partirJe parle bien ici de la décision de partir, et non de la découverte du phénomène.apparaît sur un temps charnière, qui se base sur la remise en cause de son parcours professionnel due à une modification d’optiques personnelles. Mais l’orientation ou la fin d’une carrière professionnelle n’est pas le seul exemple de ce temps de transition. Ainsi Amanda, pèlerine américaine a effectué ce voyage dans un besoin de réflexion sur l’avenir de son couple, en lequel elle voyait une impasse. Elle s’est imposée de faire un choix entre deux vies, celle avec son partenaire, ou celle sans. Dans un cas comme dans l’autre, le changement de situation s’imposait pour elle.

Cet appel se conçoit donc souvent sur un temps de transition, pendant lequel l’individu peut entrevoir un certain recours dans la mise en place d’une pérégrination au long cours. Certains percevront même un déclic à cette première étape du projet. Ce déclic s’opère seulement chez quelques individus, lorsqu’ils arrivent à définir précisément ce ou ces « ressentis » – si bénins soient-ils, mais qui favorisent tout de même la décision de partir – omniprésents, ainsi qu’à leur donner une certaine dimension d’action sur leur vie au quotidien. Mais dans beaucoup de cas, l’expérience du pèlerinage au long cours est perçue par l’acteur comme une sorte d’approche méthodologique, pour répondre à ces « ressentis » – parfois même transformés en besoins - encore mal définis, voire mal évalués. C’est pourquoi toutes les raisons sont bonnes pour partir, histoire de franchir le pas qui mène à la solution, ou plutôt à la réflexionPrenons les exemples de deux pèlerins, Stephan et Alberto : le premier est journaliste, sans emploi suite à la mise en place d’un plan social dans son entreprise. Il décide de partir pour tenter de faire le point sur sa vie autour de deux questions centrales. La première est la réorientation professionnelle qu’il souhaite entreprendre, et la seconde est organisée autour de la situation matrimoniale qu’il a choisi quelques années auparavant en refusant de se marier. Le second individu, Alberto, divorcé et célibataire depuis, effectue le pèlerinage une fois par an, depuis sa séparation. Celui-ci, ne sait quelles raisons le poussent chaque printemps à effectuer le pèlerinage. Lorsque je lui ai posé la question s’il le faisait dans un sentiment religieux, celui-ci m’a répondu que cela allait de soi, mais qu’il y a quelque chose en plus, qu’il ne saurait définir. Que toutes ces pérégrinations tenaient plus de l’introspection que de la religion. Dans le premier cas, Stephan sait pour quelles raisons il part… Dans le second, Alberto ne connaît pas les raisons de ses départs successifs… Pourtant, tous deux m’expliquent qu’ils cèdent à l’expérience de la pérégrination au long cours des vertus salvatrices. Nous voyons bien ici que les raisons de départs sont différentes pour chacun d’entre eux, mais il semble que celles-ci soient prises lors d’un certain temps de transition. Pour Stephan, ce départ devient même une forme de solution pour répondre à un besoin plus ou moins clairement défini : arriver à faire le point dans un moment de sa vie où tout ce qu’il avait mis en place jusque là est remis en question. Alberto lui ne sait ce qui le pousse sur la route, il n’arrive qu’à expliquer ces « ressentis » face à ce qu’il a vécu. De plus, Stephan m’a décrit l’appel du pèlerinage comme un déclic, alors qu’Alberto comme quelque chose d’inexplicable. Dans un cas comme dans l’autre, on comprend bien l’intérêt du pèlerinage pour les deux : la marche est bien envisagée comme une approche méthodologique, un certain recours pour comprendre, assumer, réfléchir… Bref, vivre cette situation changeante..

Cependant, nous verrons par la suite que ces « ressentis » (qui favorisent l’idée de partir pour Compostelle) sont plutôt modelables à souhait et que bien des nuances s’intègrent face à l’expérience du pèlerinage au long cours. Bien souvent, ceux-ci sont caractérisés par la personnalité et le vécu de l’individu, les deux pouvant être des plus différents, d’une personne à l’autre. C’est de cette façon qu’en interrogeant une personne sur ces mêmes « ressentis » avant, pendant et après le pèlerinage, ceux-ci n’ont plus les mêmes tenants et aboutissants, parfois plus le même contenu. Avant le départ, la plupart associe différentes raisons de partir : une simple envie de découvrir la beauté du patrimoine, du paysage, avec le besoin de faire le point sur un changement d’une situation par exemple, ou encore à l’envie de se recentrer sur sa « spiritualitéCe mot souvent employé par les pèlerins, permet de faire un amalgame respectable entre quête de sens et raisons de partir. Celui-ci fait partie la plupart du temps des premières raisons présentées par les pèlerins pour expliquer leur pèlerinage. Je ne m’étendrais pas plus longtemps ici sur le sujet, car il fera l’objet d’explication lors de l’analyse de la problématique pèlerine. »… Autant joindre l’utile à l’agréable. Mais une fois la décision de partir prise (quand bien même on ne sait pas vraiment pourquoi on part), tout ressenti supplémentaire est alors valable tant qu’il alimente le corpus de justifications qui légitime l’appel de la route.

Reste à savoir comment germe l’idée de partir vers Compostelle dans l’esprit des individus. C’est ici que les réseaux jacquaires rentrent en course. Comme je l’ai évoqué précédemment, l’essor du pèlerinage a connu un certain regain au XXe siècle. Il n’est pas rare lorsque vous discutez de Compostelle avec un de vos amis, un de vos voisins, ou encore un de vos collègues…, que celui-ci connaisse quelqu’un qui a lu un article, qui a entendu parler ou vu un pèlerin, une exposition ou une manifestation sur saint Jacques de Compostelle. Certains connaîtront même la littérature inspirée du phénomène jacquaire comme le pèlerin de Compostelle de Paulo CoelhoCoelho, P., 1987, Le pèlerin de Compostelle, Paris, éd. Anne Carrière., Priez pour nous à Compostelle de Barret et GurgandBarret, P. et Gurgand, J.N., 1978, Priez pour nous à Compostelle, Paris Hachette ou encore Mon chemin de Compostelle de Shirley Mac LaineMac Laine, S., 2000, Mon chemin de Compostelle, Paris, éd. Plon.. Pour le cas de Jean par exemple, il semble qu’il ait découvert les chemins de Compostelle en vacances dans le sud, quelques 25 ans plus tôt, lors d’une exposition mentionnant les chemins de Compostelle. Aujourd’hui, le succès du pèlerinage au long cours s’étend à de nombreux individus, et l’idée de marcher vers Compostelle laisse songeur de plus en plus de personnes. L’imaginaire qui évolue autour du phénomène jacquaire vous prend facilement à partie. Toutes les expositions, les récits jacquaires… vous entraînent par procuration dans l’expérience du pèlerinage au long au cours. Il suffit de s’intéresser de plus près au discours d’un jacquet, pour traduire dans ses yeux l’immense expérience qu’il a vécu lors de ses trois voyages (pour reprendre les mots de la citation). « Il s’agit d’un virus qui se transmet d’un pèlerin à un proche, qui sans le savoir, est en recherche de quelque chose […] Le plus souvent, c’est le récit enthousiaste d’un pèlerin qui peut témoigner de sa contagiosité […] On pourrait penser à les entendre qu’ils ont, comme Marco Polo, Vasco de Gamma, Jacques Cartier ou tant d’autres, découvert un autre monde » (Dutey, 2002 : 132). Bref, demander quelles sont les raisons d’un départ vers Compostelle reviendrait à se poser la question, en quoi l’expérience du pèlerinage au long cours nous transforme-t-elle ? Car, bien souvent, les individus décidés à partir, voient en cet acte un moyen de parvenir à nommer ou à remédier aux « ressentis » qui les malmènent.

En outre, je dirais qu’il existe autant d’appels de la route, que d’apprentis et d’ex-pèlerins. Pour appuyer cette affirmation, il suffit de consulter les statistiques, et de se rendre compte qu’aujourd’hui le phénomène s’amplifie, à tel point que l’acteur du pèlerinage ne se retrouve plus dans l’image supposée du pèlerin religieux. Retraités, travailleurs, étudiants, hommes, femmes, Français, Espagnols, Européens…, tous ont franchi le cap, pour se retrouver sur la route. Cet appel fait partie intégrante du processus, car il en est son support de base. Comme je l’ai dit, il se présente le plus souvent dans un temps de transition, et offre à celui qui sait prendre, une certaine palette d’outils pour répondre à quelques ressentis latents. Le pas qu’il reste alors à franchir lorsque l’on est sensible à ce phénomène, est fait de pure détermination, qui poussera ou non l’individu, vers l’expérience pèlerine, et la deuxième étape du premier voyage, de la première séquence : la mise en place du projet.

 

2 - Mise en place du projet

 

Pérégriner au long cours entraîne un certain nombre d’obligations. Comme tout voyage, le pèlerinage se prépare. Chacun y va de sa touche personnelle pour s’organiser, car les moyens et les besoins diffèrent d’un individu à l’autre. Chacun se prépare donc selon ses aptitudes physiques, ses envies, ses nécessités, ses connaissances en la matière… surtout selon son expérience. Généralement, l’individu qui prépare son premier pèlerinage porte une attention des plus optimales à toutes les étapes préliminaires. Pour ceux qui ont déjà une expérience avancée dans ce domaine, qui en sont à leur deuxième pèlerinage voire plus, cette étape s’organise plus rapidement, ou parfois plus sérieusement et plus lentement que la fois précédente (selon l’expérience tirée du précédent pèlerinage). Pour ces derniers, la découverte étape après étape du pèlerinage n’a plus lieu d’exister puisque, expérience oblige, chacun sait comment s’organiser - surtout comment aller à l’essentiel – pour ne prendre que le strict nécessaire, qui permettra un certain confort de marche. Car il ne faut pas oublier que le pèlerin porte « sa maison sur son dos ». Tout ce dont il estimera avoir besoin, il devra le transporter (ou le faire voyager) avec lui.

Mais dans tous les cas, l’organisation de la marche au long cours est une étape primordiale. Car elle est décisive, et celle-ci peut énormément jouer sur l’aboutissement du projet. Une simple erreur d’estimation, même pour les plus expérimentés, peut causer l’arrêt peut-être définitif de la marche : un sac trop lourd, des chaussures mal adaptées, un manque de préparation physique... et plus encore, car la dimension physique de l’épreuve n’est pas la seule (ce que nous verrons plus tard). Il ne faut pas oublier que l’individu s’engage dans une expédition qui varie entre 100 et parfois 3000 kilomètres à pied selon le point de départ… Même et surtout si l’on décide de faire le pèlerinage en plusieurs étapes espacées dans le temps, car les premiers pas sont souvent ceux qui coûtent le plus cher.

Bref, tout est bon pour faire monter le stress jusqu’à l’ultime moment du départ.

La mise en place du projet s’effectue la plupart du temps en cinq étapes :

  • Recherche d’informations sur le sujet (lors d’un premier pèlerinage, ou pour compléter celles que l’on a déjà accumulées lors des précédents)
  • Choix de l’équipement et paquetage
  • Mise en situation
  • Choix de l’itinéraire, des étapes quotidiennes, et du budget
  • Choix d’une date de départ

Ces cinq étapes préparatoires ne sont pas forcément successives, car tout dépend du mode d’organisation. Si l’apprenti pèlerin choisit de se référer aux conseils d’un guide préparatoirePar guide préparatoire, j’entends un manuel d’instructions qui s’oriente autour de la pratique du pèlerinage au long cours. Ce manuel est généralement inséré dans les guides touristiques traitant des chemins de Compostelle, avec d’autres chapitres présentant les caractéristiques touristiques et historiques des régions, les itinéraires conseillés, ainsi que des cartes plus ou moins détaillées de ces derniers. On trouve aussi des manuels pratiques, dépourvus d’explications historico-touristiques, se concentrant plus sur la préparation du pèlerinage au long cours et la description physique des différentes étapes de celui-ci. , il procèdera selon la marche à suivre prédéfinie par celui-ci. Il peut aussi s’inspirer des conseils d’une personne ayant déjà effectué le pèlerinage. L’apprenti pèlerin a en conséquence, le choix de son mode d’organisation et gère les différentes étapes préparatoires selon ses convenances. Il peut très bien se passer de guide, de conseils d’anciens pèlerins, tout comme effectuer un bricolage entre toutes les différentes interprétations existantes, pour se faire sa propre opinion. Mais il existe une règle d’or, sur laquelle tout manuel et ancien pèlerin insiste : ce qui est valable pour l’un, ne l’est pas forcément pour l’autre. Seul l’individu concerné peut se forger sa propre expérience de la marche au long cours, sur le terrain. Ainsi, tous se rejoignent sur ce point, et conseillent de tester son matériel et ses capacités physiques au préalable comme toute longue randonnée, afin de limiter les risques physiques de l’expérience. De plus, chacun insiste sur le fait qu’il faut être vigilant lors des premières marches, même s’il on est sûr de soi-même et de son matériel.

Recherche d’informations  

Cette étape peut commencer bien des années auparavant. Elle s’intensifie à la période qui précède le départ, et s’étend jusqu’à ce que la soif de connaissances sur le sujet soit étanchée. Cependant, il existe trois types d’informations que le pèlerin peut rechercher à différents moments :

  • Des informations d’ordre pratique comme un guide du pèlerinage, itinéraires, cartes… Celles-ci guident l’organisation physique du pèlerinage. Nous pouvons les classer en trois catégories : la première comporte tous les conseils pratiques, applicables en théorie par tout le monde lors de l’élaboration du projet ainsi que sur la route ; la deuxième comporte toutes les cartes et les itinéraires proposés ; la dernière étant les contacts utiles concernant les hôtels, gîtes, restaurants, pharmacies…
  • Des informations concernant les données descriptives du pèlerinage, historiques, touristiques…
  • Ainsi que toute la documentation qui touche de près ou de loin à l’expérience pèlerine vécue, comme les récits de pèlerins, la description des sentiments personnels des étapes… Ces informations peuvent se regrouper en deux catégories : la première intègre les différents exemples personnels d’organisation et façons de pérégriner sur les chemins (expérience individuelle pratique) ; la seconde concerne les autres expériences du chemin comme la problématique pèlerine, par exemple.

Cette recherche d’informations accompagne au fur et à mesure l’individu dans ses démarches. L’apprenti pèlerin - avant de prendre la décision de partir pour la première fois - commence souvent par se procurer des informations générales sur Compostelle. Acheter un livre sur Saint Jacques, lire la définition du pèlerinage dans l’encyclopédie, faire quelques recherches sur Internet…, voire pour les plus déterminés, se renseigner sur quelques points pratiques. Car le premier objectif de la recherche d’informations, est de savoir si le pèlerinage au long cours est réalisable à son échelle. Nous verrons par la suite, comment cette recherche d’informations s’inscrit plus en profondeur dans la démarche pèlerine, notamment après le retour. Mais pour l’instant, restons sur la recherche d’informations avant le départ.

Il existe plusieurs types de sources d’informations : celles qui sont spécifiques à un sujet particulier comme l’histoire du phénomène par exemple, et celles qui sont plus généralistes ou qui englobent différents types d’informationsPrenons l’exemple d’un guide édité par l’édition Rando (Véron, G., Laborde-Balen, L., 2003 : Le Chemin de Saint-Jacques en Espagne, Ibos, Rando éditions). Celui-ci combine les deux premiers types d’informations. Une approche historique du phénomène (appartenant au 2 ème type d’informations), une approche pratique (1 er type), un guide étape après étape - composé d’une carte pour chaque itinéraire quotidien et une description physique de ceux-ci - (1 er type), ainsi qu’une floraison de détails touristiques à chaque étape (1 er type).. Voici un tableau (page suivante) qui présente les principales sources auxquelles l’apprenti pèlerin se référera lors de cette étape, ainsi que le type d’informations qu’elles fournissent.

 

Informations

 

 

 

 

Sources

De type pratique

De type

descriptif

Relatives à

l’expérience

pèlerine

 

Carte

Itinéraires

Marche à

Suivre

Contacts utiles

Historiques

Touristiques

Exemples d’organisation et de pratique personnelle

Autres expériences

du chemin

Associations Jacquaires

Exposition

Conseils de Pèlerins

Télévision 

Journaux T.V.

Reportages

Site Internet 

Associations

Officiels de Compostelle ou autres villes

Personnels

Centre de recherche

Livres 

Guides

Généraux

Fictions

Etudes

De pèlerins

Tableaux des principales sources d’informations consultées par l’apprenti pèlerin avant le départ

 

Cartes et itinéraires des chemins, ainsi que tous renseignements concernant la description historique et touristique du pèlerinage sont souvent consultés en premier par l’intéressé, lorsque la curiosité le pousse à s’interroger sur le phénomène. Rien ne l’empêche de se procurer ces types d’informations longtemps avant de partir. Il découvre alors la dimension mythique du phénomène, la marche au long cours, et tous ces milliers de gens qui s’entrecroisent sur les routes de Compostelle… L’apprenti pèlerin, mais aussi l’hypothétique futur pèlerin - ou encore le simple curieux - recherchent ces types d’informations pour donner un premier cadre descriptif et général au phénomène (comme je l’ai évoqué plus haut). Les informations plus concrètes, comme la marche à suivre, les conseils d’anciens pèlerins, puis en dernier, les contacts utiles sont généralement sollicités lorsque l’individu a déjà pris sa décision de partir, mais rien ne l’empêche de se les procurer avant de décider. Mais le plus souvent, l’individu souhaite recueillir les informations les plus récentes, ce qui peut l’amener à racheter un guide si celui qu’il possède est trop ancien, ou simplement réactualiser ses informations. Celui-ci sera alors souvent bien avancé dans la recherche et découvrira, au fur et à mesure, des dimensions nouvelles du phénomène, de plus en plus spécialisées comme l’organisation de la marche, des étapes quotidiennes, des objets dans son sac…

Prenons maintenant deux exemples complètement différents pour traiter des informations relatives à l’expérience pèlerine vécue : celui de Jean, et celui de Maria. Jean est un jeune retraité français ayant effectué le pèlerinage en 2002, de chez lui (région parisienne) à Compostelle. Maria, originaire du Brésil, a effectué les deux cents et quelques derniers kilomètres du pèlerinage, à partir d’Astorga au mois de Mars. Jean a volontairement évité de s’informer avant le départ sur tout ce qui touche de près ou de loin à la problématique pèlerine et à la description physique des chemins. Pour lui, si une préparation au voyage nécessite d’obtenir des informations pratiques sur la marche à suivre et les itinéraires, en revanche, toutes les informations concernant la description physique des étapes, des paysages et surtout des expériences du chemin, doivent être découvertes au fur et à mesure de la pérégrination, comme pour garder une certaine dimension où « l’exploration » est primordiale. Lors de ses recherches, il a volontairement écarté les sources comme les livres de pèlerins, les fictions, et les parties concernant ce type d’informations lors de contacts avec les associations jacquaires, de visite sur les pages web de celles-ci et d’anciens pèlerins. Il a donc décidé de ne découvrir au préalable, que ce qui se rapporte à l’expérience pratique de la marche au long cours et à son organisation. Pour le reste, cela doit se faire sur le terrain. Maria, quant à elle, a (re)découvert le phénomène par l’intermédiaire du livre de Shirley Mac Laine : Mon chemin de CompostelleLors de l’entretien, Maria m’a expliqué qu’elle avait entres autres lu l’œuvre de Paolo Coelho (Le pèlerin de Compostelle) quelques années auparavant, sans pour autant accorder d’importance au pèlerinage en lui-même. Elle l’a redécouvert en se plongeant dans la lecture de l’œuvre de Mac Laine, qui présente le récit du pèlerinage de l’auteur.. Celle-ci a alors concentré ses recherches sur toutes les informations qu’elle a pu trouver, notamment sur Internet et dans les livres (de fictions, historiques, photographiques et de pèlerin) édités sur le sujet. Son choix de partir à l’autre bout du monde seule, pour deux semaines sur le Camino Francès (durée qu’elle considère plutôt dérisoire par rapport à ce qu’elle a lu ou entendu), l’a poussée à se renseigner sur tous les aspects du pèlerinage, pour pouvoir, selon elle, « en profiter le plus rapidement possible ».

Aujourd’hui, il est possible de trouver des informations sur le pèlerinage de Compostelle plus rapidement qu’autrefois. Car les sources sont de plus en plus nombreuses : l’édition d’ouvrages, le nombre d’associations jacquaires croissant, les multimédias et notamment Internet… permettent une diffusion du phénomène vers un public de plus en plus large. Pendant les années saintes, la télévision espagnole consacre plus d’un reportage télévisé au phénomène. Sur la route, lors de mes arrêts dans des auberges ou bars ayant la télévision, j’ai compté plus de 7 reportages (lors des informations) sur les pèlerins confrontés aux intempéries, ou sur les évènements jacquaires (à Compostelle ou ailleurs) et leur organisation ; ainsi que 2 publicités différentes vantant les mérites du pèlerinage. Mais la télévision espagnole n’est pas la seule ; la chaîne de télévision française TF1 proposait au cours du mois de Juillet 2004 un reportage sur les pèlerins de Compostelle à chaque fin du journal de 13 heures, mettant en scène la vie quotidienne des pèlerins.

On compte en France parfois plus d’une association jacquaire par région, et au moins une, par département où passent les grands axes qui mènent à Compostelle. Internet propose aussi un moyen d’accès facile à tous types d’informations concernant le sujet. Lorsque l’on tape les mots pèlerinage et Compostelle sur le moteur de recherche Google, on trouve plus de 18000 réponses, en différentes langues. Sur le site : http://compostela2004.free.fr/liens_jacquaires.htm , on trouve plus de 250 sites jacquaires répertoriés, dont plus de 130 liens en français et espagnol, 50 en anglais, 12 en allemand, 36 en portugais (et brésilien), et 34 en diverses langues. Ce site propose aussi de renvoyer le lecteur sur les sites officiels de la cathédrale ou de Galice, les sites des associations jacquaires ou encore sur des pages personnelles. Enfin, on observe une recrudescence d’édition de livre contenant chacun des types d’informations, dont les ventes sont excellentes. L’apprenti pèlerin a donc le choix dans tous ces types de sources, et chacun peut organiser ses recherches selon ses convenances. Il peut trouver des informations qui vont de la généralité, à la spécialisation, se mettre en relation avec les associations, ou se servir d’un guide. Le guide reste le plus souvent utilisé, même si parfois celui-ci ne permet pas de répondre à toutes les interrogations de l’individu. En deuxième position, on trouve les associations jacquaires, dont les membres – la plupart du temps ayant effectué le pèlerinage – propose d’aider l’apprenti pèlerin dans ses démarches.

Choix de l’équipement et paquetage

Cette étape s’organise entre le moment où la décision de partir est prise, et le futur départ. Elle concerne les objets que l’individu va apporter et l’organisation de ceux-ci dans le sac. Encore une fois, il n’y a pas d’obligations, chacun s’organise comme il l’entend. Il existe cependant quelques conseils repris par toutes les sources d’informations. Ils sont les apports de l’expérience pratique de nombreux pèlerins précédents. Ceux-là concernent l’importance de choisir un équipement qui s’adapte aux nécessités et aux convenances personnelles sans excéder dans le poids, ainsi que l’organisation de son sac pour éviter une perte de temps et d’énergie sur la route, lorsque l’on cherche un objet, par exemple. Les conseils applicables par tous, orientés autour du choix de l’équipement s’appliquent le plus souvent à 11 domaines ou type d’objets :

  • Les chaussettes  : il est important que celles-ci puissent limiter le frottement des points sensibles du pied contre la chaussure. L’épaisseur de celles-ci doit s’adapter à la morphologie du pied et de la chaussure sans empêcher le pied de pouvoir librement s’articuler. Elles doivent éviter les risques de plis ou de glissement du pied, ainsi qu’avoir une capacité d’isolement tout en permettant l’évacuation de la transpiration. A partir de là, chacun s’oriente sur la matière qui lui convient le mieux : coton, laine, synthétique, hydrophobe…
  • Les chaussures  : c’est ici un des choix le plus difficile. Car la morphologie du pied n’est pas le seul critère : il faut les choisir en fonction du confort, de leur fiabilité, de leur poids, de leur robustesse, du type d’étanchéité, de leurs caractéristiques, du type de semelle, de laçage et de chaussettes, mais aussi du poids supporté lors de la marche, de sa façon de marcher, du temps passé sur la route, des caractéristiques du chemin emprunté... Tant de points, mais surtout de types de chaussures qu’il est souvent difficile de connaître celles qui conviennent le mieux. Car mis à part les randonneurs confirmés qui connaissent leurs besoins en la matière, plus d’un pèlerin souffrira de blessures plus ou moins graves lors de la marche au long cours, dues à un mauvais choix de chaussures. De plus, il est conseillé d’avoir deux paires, une réservée à la marche pure et dure, l’autre pour les temps de repos ou, lors d’une marche sans trop de difficulté par temps clément. Il s’agira de choisir une paire de chaussures de marche, ainsi qu’une deuxième paire, par exemple de sandales ou de baskets fines. Encore une fois, ce n’est pas une obligation, mais un conseil. En outre, la chaussure devra permettre un maintien du talon sans frottement irritant, mais aussi de l’avant tout en laissant un espace libre devant les orteils pour éviter les chocs en descente. Pour les chevilles, chacun devra choisir s’il est nécessaire de les soutenir ou pas. Car tout dépend cette fois-ci de la morphologie du pied et du type de chemins empruntés. Il sera de même pour la rigidité ou la souplesse de la chaussure. C’est pour cette raison qu’il est important au préalable de connaître les types de chemins empruntés lors de la marche, afin d’opter en la faveur d’une paire de chaussures qui convient. Il est, de plus, important de les tester avant le départ.
  • Le sac à dos  : celui-ci doit être adapté aux pratiques de l’individu. Il sera choisi selon des critères de confort de portage, de son volume, de sa rigidité, de sa ceinture (qui soutient le poids et soulage les épaules), de ses facilités d’accès aux objets, de ses fermetures, et de son imperméabilité. Le réglage doit permettre de pouvoir supporter le poids tout en ayant une aisance de mouvements.
  • Les protections contre la pluie  : le poncho, toile imperméable qui recouvre tout le corps et le sac, est le plus souvent employé et recommandé.
  • Protections contre le froid  : celles-ci sont emmenées lorsque l’on effectue le pèlerinage en dehors de l’été et du printemps.
  • Protections contre le soleil par toutes les saisons (peu respectées par saisons froides, mais souvent regrettées).
  • Vêtements de marche  : ici chacun s’organise à sa manière. Il est souvent recommandé d’avoir des vêtements qui se lavent et sèchent rapidement.
  • Sac de couchage  : Celui-ci doit être adapté à la saison de voyage et à la façon dont on souhaite dormir (Peu nécessaire à l’hôtel, mais utile en gîte ou en camping).
  • Complément pour les campeurs à la belle étoile  : emporter du matériel le plus léger possible (tente, et réchaud). Mais ce point ne s’applique qu’aux individus souhaitant camper.
  • Transport de l’eau  : Il est fortement conseillé de transporter ses boissons, surtout en saisons chaudes.
  • Trousses de premiers secours .

Voici le plan de base, sur lequel repose l’organisation de la plupart des pèlerins. A partir de celui-ci, chacun y va de ses petites nécessités personnelles qui s’ajoutent à la liste, pour finaliser son équipement. Voici un exemple de liste d’équipements - sac compris (2,4kg) - pour la saison d’hiver, d’un homme mesurant 1m 76, pesant 84kg allant de Roncevaux à Compostelle :

      • Lot de base  (6,3kg + 2,4kg) : 2 pantalons, 3 T-shirts, 4 sous vêtements, 2 Pulls, une veste coupe vent, 4 paires de chaussettes, 1 écharpe, 1 paire de gants.
      • Protections  (1kg) : 1 chapeau de paille, 1 poncho, 1 paire de chaussures de marche, 1 paire de sandales.
      • Effets de couchage  (1,6kg) : sac de type sarcophage chaud.
      • Matériel de toilette  (1,3kg) : 1 savon de Marseille (pour se laver soi et les vêtements), 1 brosse à dents, 1 tube de dentifrice, 1 serviette de toilette, papier hygiénique, coupe ongles.
      • Matériel de petits soins  (1kg) : 1 couverture de survie, 2 boîtes de « seconde peau » (ampoules), pansements, ciseaux, compresses, désinfectant, alcool de romarin (pour les jambes), pommade anti-inflammatoire, 2 boites de paracétamol.
      • Petits équipements  (2,5kg) : 1 couteau, 1 fourchette, 1 cuillère, une gamelle, une aiguille et du fil, 5 épingles à nourrice, 1 lampe frontale, 2 carnets, 3 stylos, 1 lecteur CD, papiers d’identités, 3 livres, 1 guide, 1 pochette portable autour du coup, moyens de paiements (carte et chèques), 1 appareil photo, 1 téléphone portable et chargeur, pétards, cartes des chemins, piles.
      • Nourritures, 1 gourde (capacité 1litre).

Poids total du sac : charge minimale environ 12kg à 20kg (avec l’eau et la nourriture), sachant que l’individu porte sur lui des vêtements et une paire de chaussures. La plupart des guides préconisent de ne pas s’alourdir, et ce dernier exemple de sac est beaucoup trop lourd selon leurs estimations. Ils tentent souvent de décourager l’individu de prendre des objets qui n’auront aucune nécessité pour la marche, ou au contraire des objets de première nécessité comme la pharmacie, car ces derniers sont trouvables en cours de routeParticulièrement pour les objets de premier secours. Tout au long des chemins de Compostelle, parfois même dans le plus reculé des villages, on trouve des pharmacies (ou l’équivalent), des magasins de ravitaillement, bars et autres domaines de restauration… ce que nous verrons plus tard. . Ces conseils tentent de rassurer l’apprenti pèlerin, en lui expliquant qu’il ne part pas pour une aventure loin de toute civilisation, puisqu’il traversera des centaines de zones habitées avant de franchir les portes de Compostelle.

Enfin, le bâton de pèlerin est le dernier équipement envisageable, car beaucoup partent sans. Pour ceux qui s’accordent sur l’utilité du bâton, en revanche, tous ne s’y prennent pas de la même façon. Selon certains, il faut se munir d’un bâton ferré, selon d’autres, on le trouvera en cheminSujet qui sera consacré plus tard dans la partie concernant l’application de la marche au long cours.… Chacun décide du bâton qui lui convient. Aujourd’hui, les pèlerins confirmés qui en sont déjà à plusieurs pérégrinations à leur actif, ont souvent leur propre bâton sculpté, ferré et marqué de la coquille saint Jacques. D’autres préfèreront marcher avec des bâtons en fibres de carbone (par exemple) spécialement conçus pour la marche au long cours, ou la randonnée, voire même un bâton de ski.

La deuxième étape dans l’organisation - une fois la liste des équipements faite – est la répartition dans le sac des objets, ainsi que son optimisation pour un confort personnel de marche et d’utilisation.

Souvent, chacun organise ses objets par famille, c’est-à-dire par type d’utilisation. Prenons l’exemple d’organisation du même sac à dos que précédemment. Celui-ci contient un compartiment inférieur et supérieur, deux poches transversales, et deux autres au dessus du sac (dont une intérieure), ainsi que quatre poches sur la ceinture :

 

Modèle de sac pour homme Quechua Forclaz 60 air

 

  • Dans le compartiment supérieur, les vêtements sont en partie répartis dans deux sacs plastiques : les vêtements propres dans l’un, les sales dans l’autre, au centre du compartiment. La serviette de toilette étant entre les deux sacs, et les pulls au dessus. La veste est portée sur le sac, si elle n’est pas nécessaire.
  • le duvet est dans le compartiment situé au fond du sac (accessible par l’ouverture du bas). De cette façon, il ne gênera pas l’accessibilité vers d’autres objets.
  • les protections contre la pluie sont dans une poche transversale, pour une accessibilité rapide.
  • les affaires de toilette sont dans un même sac, avec le savon de Marseille dans un sac indépendant, le tout au-dessus des vêtements.
  • La gourde est dans la seconde poche transversale (accessibilité rapide).
  • La nourriture en haut du compartiment supérieur du sac.
  • Les cartes et guides dans une des poches supérieures du sac (extérieure).
  • Les livres dans la poche supérieure intérieure.
  • La paire de sandales en dessous de la nourriture.
  • La trousse de secours au fond du compartiment supérieur.
  • Le petit matériel est réparti dans les quatre poches de la ceinture, sauf pour les carnets, les stylos, les moyens de paiements et les papiers d’identité. Les deux derniers types sont dans une pochette conservée autour du cou, et les autres dans la poche supérieure extérieure.

Mais cet exemple n’est pas le seul. Certains s’organiseront autrement, selon la fréquence d’utilisation de tel ou tel type d’objets. Par la suite, l’organisation du sac peut évoluer, tout dépendra des activités quotidiennes et des évènements et/ou intempéries vécus sur la route. Ainsi, une pèlerine à proximité de Burgos, m’expliquait qu’elle ne cessait de se blesser tout au long du chemin. Elle a finalement décidé de fixer sa trousse de secours en dehors du sac sur la poche supérieure (initialement placée au fond du sac, sous le duvet), de sorte qu’elle soit toujours accessible rapidement. Un autre pèlerin rencontré à Sahagun, avait pour habitude de placer ses chaussettes dans la poche supérieure extérieure depuis le départ, de sorte qu’il puisse changer de paire toutes les deux ou trois heures, lorsqu’il estimait que les siennes était trop humides.

Mais revenons pour l’instant à l’organisation du sac lors de la mise en place du projet. La plupart des conseils insistent sur le fait que la charge maximale ne doit pas excéder 1/8, voire 1/10 du poids total de l’individu, sous risque de créer un certain nombre de déficiences physiques, comme une fatigue musculaire des épaules ou des articulations osseuses.

Mise en situation  

Cette étape s’exécute généralement entre le moment où la décision de partir est prise et le futur départ. Chacun s’exerce plus ou moins selon ses aptitudes physiques, mais aussi en fonction de certaines habitudes personnelles, qui doivent être remises en cause pour l’aboutissement du projet. Vous l’aurez compris, cette étape est un entraînement, qui a pour but de tester son matériel, mais aussi ses capacités à assumer toutes les situations, lors du futur pèlerinage. On retrouve deux types de mise en situation :

  • Mise en situation réelle  : Celle-ci consiste à se mettre sur la route, et à marcher dans les mêmes conditions supposées que celle d’une marche au long cours.
  • Mise en situation « fictive »  : elle consiste à tenter de se défaire de certaines habitudes quotidiennes qui sont incompatibles avec le projet.

Chaque individu se prépare à sa façon, selon ses convenances et ses possibilités. Par exemple, pour certains, la préparation physique est primordiale, pour d’autres, ce sera plus une préparation afin d’assumer une rupture avec la vie courante, ou encore avec la famille et/ou le conjoint. L’individu se prépare selon le temps qu’il estime nécessaire pour être fin prêt, et les lacunes personnelles qui interfèrent dans sa préparation (auxquelles il veut remédier avant de partir). Prenons  les cas spécifiques de trois pèlerins afin de mieux comprendre: ceux de Jean (cités plus haut), de Rebecca (Finlandaise, retraitée, ayant marché seule de Saint-jean-Pied-de-Port à Compostelle au moins de Mars), ainsi que celui d’Enrique (cité plus haut, ayant tout quitté d’un coup, travail, appartement…, pour partir seul sur les routes de Compostelle). Chacun s’est préparé de façon différente. Jean a opté pour une préparation physique intense, étalée sur plusieurs mois. Il est parti sur les routes de son département et dans le sud de la France, pendant plusieurs séjours plus ou moins longs accompagné de sa conjointe, afin de tester son matériel et ses capacités. Il a choisi plusieurs types de route, allant du chemin de campagne au bitume des nationales. En outre, il a décidé de faire une rupture nette lors de son départ, entre sa vie courante et le moment où il serait sur la route, une fois la préparation physique effectuée. Rebecca, quant à elle, a décidé de se préparer tant physiquement que mentalement. Cette dernière préparation s’est déroulée en effectuant plusieurs séjours de marche en dehors du cadre familial et loin de son mari, avec qui elle a tout partagé, depuis plus des trente dernières années. Enrique, a décidé de partir sans préparation physique au préalable, sachant bien qu’il n’avait pas effectué d’efforts physiques depuis le service militaire. Il estimait l’entraînement inutile, puisque selon lui, il se ferait naturellement lors des premiers jours. De plus, étant pressé d’effectuer un changement radical dans sa façon de vivre, le fait de partir rapidement l’a conforté dans la décision de quitter son emploi, son appartement, et de céder ses biens sans avoir de remords, voire de doute. Comme vous pouvez le constater, chacun se prépare comme il l’entend, avec une façon de procéder particulièrement affectée par l’interprétation personnelle du projet, de ses tenants et aboutissants.

Choix de l’itinéraire, des étapes quotidiennes et du budget  

Cette étape se met en place entre le moment où la décision de partir est prise et le départ. En premier, l’apprenti pèlerin définira un point de départ du pèlerinage et un point d’arrivée. Si l’on devine facilement que l’objectif est le plus souvent d’arriver à Compostelle ou à Fisterra (un peu plus loin sur la côte), en revanche le point de départ dépend de plusieurs paramètres : le temps que l’on décide de passer sur la route, le type de route que l’on souhaite emprunter, les villes sur les chemins que l’on souhaite traverser ou non, les capacités physiques (et autres) de l’individu…

Il existe deux types de point de départ :

  • Partir de chez soi , et rejoindre un chemin jacquaire en cours de route.
  • Partir d’un point précis sur un des différents chemins . Le plus souvent, il s’agit de villes ou villages, point de départ pour beaucoup de pèlerins. Parmi celles-ci, on retrouve en France les villes de Tours, Vézelay, le Puy-en-Velay, Arles, Saint-Jean-Pied-de-Port. En Espagne, on retrouve les villages de Roncevaux et d’O’Cebreiro, et les villes de Burgos, Leon, ou encore Astorga.

Une fois le point de départ fixé, reste à savoir si l’individu veut effectuer le pèlerinage en une seule fois, ou en plusieurs étapes réparties dans le temps. Son organisation dépendra de ce qu’il souhaite accomplir, mais aussi de ses disponibilités dans le temps, car celles-ci peuvent varier d’une semaine à plus de deux mois selon le point de départ, et pour un aller simple. Car chacun doit pouvoir consacrer un certain temps à l’entreprise d’un tel projet. Aujourd’hui, il est de plus en plus fréquent pour un individu, de sectionner en étapes dans le temps et dans l’espace son pèlerinage (cf : annexes / 3 - Exemples d’étapes). L’exemple de Marc rencontré à Saint-Jean-Pied-de-Port, retraité de 62 ans, nous présente bien cette situation. Il est parti de Paris voilà plus de 6 mois. Celui-ci découpe dans le temps chaque étape de marche (allant d’une à deux semaines), pour des raisons familiales. Lorsqu’il est arrivée à Pampelune, il a du repartir chez lui, pour découvrir son deuxième petit fils, né quelques jours auparavant. De plus, il souhaite terminer l’expérience du pèlerinage sur le Camino Francès avec sa compagne, disponible que partiellement. Le cas d’un couple allemand retraité, rencontré à Najera, présente aussi le même découpage dans le temps et l’espace de l’expérience du long cours, mais cette fois-ci pour des raisons de santé physique. Voilà bientôt plus de deux ans qu’ils effectuent tous les six mois, un tronçon à partir de la voie de Vézelay.

Les moyens de transport actuels, comme le train, l’avion, ou encore la voiture permettent facilement de sectionner son périple, tout en le recommençant la fois suivante au même endroit que laissé précédemment.

Une fois le point de départ fixé et la mise en place dans le temps de la pérégrination, il reste à découper quotidiennement les temps de marche, ainsi que la distance parcourue au jour le jour. Cette fois-ci, tout dépend principalement de deux choses :

  • la condition physique dans laquelle l’individu se trouve, et sa capacité à se remettre d’une marche étalée sur toute la journée.
  • le temps que l’on souhaite rester dans tel ou tel endroit.

Il faut garder à l’esprit que le découpage des étapes quotidiennes lors de cette étape préparatoire, est bien souvent difficile. La plupart des apprentis pèlerins questionnés sur ce sujet, m’ont expliqué s’être référés à un guide qui propose des étapes prédéfinies. Pour ceux qui en ont la possibilité, ils effectueront des repérages avant de commencer. C’est ainsi qu’à Saint-Jean-Pied-de-Port lors de mon passage, un couple était en train de questionner les bénévoles de l’association des amis de saint Jacques, à propos du tronçon situé entre Saint-Jean-Pied-de-Port et Roncevaux, pour savoir si celui-ci - qui traverse les Pyrénées Atlantiques - n’était pas trop difficile.

Le budget (cf : annexes / 4 – Exemples de budgets), quant à lui, varie selon le type de voie emprunté, le type de logement que l’on souhaite, le type d’endroit où l’on se restaure, et le fait de voyager seul ou à plusieurs. Sur les axes jacquaires français, par exemple, les gîtes et les lieux de restauration sont légèrement plus chers que sur les axes espagnols. Reste à savoir si l’individu souhaite s’arrêter chaque soir dans un hôtel, dans un gîte ou encore dans un camping. Chaque lieu présente des tarifs différents, en fonction des commodités mises à disposition. Plus on désire avoir de confort, plus le prix est cher. Il en est de même avec les repas, et la qualité de ceux-ci. En outre, le fait de se restaurer à plusieurs, permet de réduire les frais, dans le cas où l’individu souhaite cuisiner sa propre nourriture. Il se fixera alors un budget quotidien selon ses convenances, et ses possibilités. Il est possible de voyager avec un coût de revient plutôt bas, comme élevé. Certains prévoiront une marge d’erreur plus ou moins grande, en fonction de leurs prévisions. Il faut cependant faire une estimation en fonction de son temps de voyage. Si l’on désire faire un aller simple, il faudra donc compter le billet de retour. Ainsi, Amanda (citée plus haut), s’est donnée comme objectif de réaliser le pèlerinage de Saint-Jean-Pied-de-Port à Compostelle en trois semaines. Celle-ci pensait pouvoir l’effectuer d’une traite, et repartir le 23 Mars de Compostelle, via le train jusqu’à Paris, puis l’avion pour Los Angeles. Elle avait réservé au préalable son billet de retour, selon ses prévisions. Au cours du voyage, elle s’est rendu compte de son erreur d’estimation, et dû effectuer une partie du voyage en bus, augmentant par la même son coût de revient.

L’estimation d’un budget se base généralement sur les conseils d’un guide touristique, d’un ancien pèlerin... Mais nous verrons par la suite, que l’apprenti pèlerin devra faire face à des dépenses imprévues.

Décision de la date du départ  

Celle-ci s’effectue lorsque l’individu a suffisamment d’informations pratiques sur le pèlerinage, et qu’il est suffisamment avancé dans sa mise en place du projet. Elle dépend d’une part, des possibilités et des objectifs de l’individu, et d’autre part, de la période dans laquelle l’individu souhaite se rendre à Compostelle. La période de départ est quelque chose d’important pour le pèlerin, et renvoie principalement à deux envies :

  • S’il souhaite ou non partir pendant la saison chaude ou froide, ou le plus souvent entre les deux (car les températures sont plus supportables).
  • S’il souhaite arriver à Compostelle (ou ailleurs sur le chemin) pour un événement particulier comme le 25 Juillet lors d’une année sainte, la semaine sainte espagnole… ou au contraire, s’il désire éviter ces temps forts du pèlerinage, et les foules qui s’ensuivent.

Certains n’hésitent pas à déplacer la date du départ, si au dernier moment, il ne se sente pas prêt, et réciproquement. Parfois, la date est choisie plus en fonction des obligations que de la période souhaitée. Ainsi Amanda, a profité de ses congés pour effectuer le pèlerinage, sachant que cette période est la seule où elle pourrait l’effectuer. Il en est de même pour Claudia, étudiante allemande, qui a profité de ses vacances scolaires pour effectuer une seconde fois le pèlerinage (à partir de Pampelune pendant le mois de Mars), sachant que les conditions météorologiques étaient défavorables.

 

Ces cinq étapes dans la mise en place du projet constituent ce que j’appelle la première séquence du pèlerinage, celle sans laquelle il serait difficile, voire dangereux, d’entreprendre une pérégrination au long cours. Ces cinq étapes s’étalent dans le temps qui sépare généralement le moment où l’individu décide de donner de l’importance à ce projet, et la date du futur départ (à l’exception près de la recherche d’informations, qui englobe parfois les trois séquences avant, pendant et après la pérégrination). Lors de cette première séquence avant le pèlerinage, cette recherche d’information peut prendre forme bien des années avant le départ, mais s’intensifie et se recentre sur l’aspect pratique du phénomène, au moment où l’individu prend sa décision de partir. Lorsque celle-ci est prise, ces cinq étapes s’entrecroisent et interagissent entre elles, en vue d’optimiser les chances de l’individu à la réussite de son projet. Nous comprenons bien que ces étapes préparatoires ne se vivent pas de la même façon chez tous les apprentis pèlerins, et peuvent prendre des tournures bien différentes selon les tenants et aboutissants personnels de chacun. Mais tous ont en commun lors de l’élaboration de ces cinq étapes, le fait de s’appuyer sur une grille d’interprétation des objectifs personnels, qui oscille entre l’organisation du projet et le temps qu’il lui faut pour y parvenir, mais aussi entre ce que le projet remet en cause et ce qu’il va – hypothétiquement – mettre en place. Car ici le fait de partir est bien un choix, qui entraîne des conséquences tant sur la vie de l’individu que sur celle de son environnement proche.

Même si finalement chaque organisation diffère d’un individu à un autre, tous se confrontent lors de cette première séquence, de ces premières expériences préparatoires, à l’appréhension du voyage qui précède le départ. Suivant les capacités de chacun, celle-ci sera surmontée avec plus ou moins de facilité et s’étalera dans un temps plus ou moins grand, qui commence dès la décision du départ. Elle se matérialise le plus souvent par l’élaboration d’un questionnement individuel qui se calque sur l’échelle de valeurs intrinsèques des individus. Car ce qui fait une des particularités de ce projet, c’est d’amener toutes sortes d’individus sur les routes. Pour la plupart, la marche au long cours est une première, et jusque là, certains n’ont jamais eu d’expérience en la matière. Les seules références sur lesquelles ils peuvent se baser, ne sont que les interprétations d’une tierce personne, et les conclusions personnelles qu’ils en tirent. Cette situation favorise l’appréhension du voyage, qui se poursuit le plus souvent jusque dans les premiers jours de marche. Voici les différents points fréquemment recueillis lors de mes entretiens, que l’on peut classer en deux catégories :

1 - Toutes les appréhensions qui se rapportent à la dimension physique de l’expérience

  • La dimension sportive : cette dimension fait partie des premières inquiétudes présentes chez les apprentis pèlerins. Doit-on être physiquement apte pour ce genre de situation ? Peut-on réellement marcher sur des centaines de kilomètres ? Arrive-t-on à trouver des lieux de repos partout, même si nous n’effectuons que de courtes distances quotidiennes ? Peut-on marcher en dehors de tout esprit de compétition ? Peut-on supporter le poids d’un sac sur toute la longueur sans risquer de se faire mal ? doit-on effectuer un certain régime alimentaire ? Toutes ces questions posent ici une première appréhension se rapportant à la dimension du corps humain.
  • La dimension météorologique : Peut-on marcher sous la pluie des heures durant ? Ai-je choisi la bonne période pour partir ? Que faire dans le cas de chemin détrempé ? Le questionnement pose ici les termes d’une appréhension pratique des chemins.
  • La dimension propre au logement : La question qui revient fréquemment est celle de la place disponible dans les lieux de repos, et renvoie à la peur de se trouver dépourvu d’un refuge pour la nuit.
  • La dimension relative à la santé et l’hygiène : Peut-on garantir une hygiène quotidienne ? Traverse-t-on des zones néfastes où la prudence est de mise ?
  • La dimension relative à l’orientation sur les chemins : Risque-t-on de s’égarer ? Le balisage est-il correct ? Traverse-t-on des zones à risques ? Si oui, comment se prévenir dans cette situation ?
  • La dimension propre à l’approvisionnement : Ne risque-t-on pas de manquer de quelque chose en cours de route ? Si tel est le cas, pourrons nous le trouver partout en cours de route ?

2 - Toutes les appréhensions issues de ce que renvoie une telle expérience à l’individu .

  • Une dimension humaine : doit-on partir seul ou en groupe ? Dois-je partir sans le soutien d’une organisation touristique ? Sur la route, reste-t-on seul ? Comment se gèrent les temps de solitude ? Y a-t-il des problèmes de sécurité sur la route, dans les auberges ? Comment peut-on nous joindre ? Que se passe-t-il si l’on ne parle pas la langue espagnole ou française ?
  • Une dimension propre à la problématique pèlerine : Doit-on être pratiquant religieux ? Dans le cas contraire  sommes-nous accepté le long du chemin? Comment vit-on l’expérience ? Est-ce une expérience qui marque ? Comment vit-on le retour ?

Ce questionnement dépend étroitement de l’expérience en la matière, propre à chaque apprenti pèlerin. C’est cette appréhension du voyage qui pousse l’individu, tout au long de sa préparation, à chercher des réponses (sur certains points jugés importants par celui-ci) auprès de sources ayant l’avantage de cette expérience : solliciter un ancien pèlerin, se rendre au siège d’une association jacquaire… Le réseau jacquaire met d’ailleurs en place un moyen pour répondre à ces différents types de questionnement. L’exemple le plus marquant est celui des « bourses aux équipiers » sur les sites Internet d’associations jacquaires, qui se présentent sous la forme d’un forum de discussion sur lequel on laisse un message pour trouver un compagnon de route. Ce forum répond à un besoin de tempérer l’angoisse d’un premier départ et de se retrouver seul ou en un petit nombre d’individus inexpérimentés, dans une situation peu ordinaire. Pour la plupart des apprentis pèlerins ayant décidé de voyager seul, voire à quelques-uns, la peur de l’inconnu les poussent souvent lors des premiers jours de marche à tout faire pour partager, même indirectement, les premières expériences du pèlerinage au long cours avec d’autres individus. Bien sûr, tous ne réagissent pas de la même façon, et n’appréhendent pas le même type d’évènements. Mais chacun devra effectuer la transition inévitable, entre vie courante et pèlerinage au long cours, qui délie l’individu de ses habitudes quotidiennes et le confronte à lui-même.